AÉRODYNAMIQUE

ÉCOULEMENT DE L'AIR


- Résistance de l'air
- Nombre de Reynolds
- Couche limite
- Décollement

Différents écoulements

On appelle Écoulement le déplacement de l'air par rapport à un objet. On distingue trois grands types d'écoulement.
Ècoulement laminaire
Les particules d'air glissent parfaitement les unes sur les autres sans échanges de particules entre elles. Elles suivent un mouvement rectiligne et parallèle.

Ecoul Rectiligne

Écoulement turbulent
Les particules d'air ont des trajectoires quasiment parallèles entre elles, mais qui ne sont plus rectilignes, tout en se déplaçant globalement dans le même sens à la même vitesse.

Ecoul Turbulent

Écoulement tourbillonnaire
L'écoulement est très désordonné, les particules se mélangent et ne suivent ni une trajectoire rectiligne ni parallèle, et certaines particules peuvent remonter le courant et former ainsi des tourbillons.

Ecoul Tourbillon
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Résistance de l'air

Chaque corps en mouvement dans l'air est soumis de la part de celui-ci à une résistante qui tend à s'opposer à ce mouvement. Cette résistance a son origine dans les propriétés de l'air, mais dépend aussi des caractéristiques du corps concerné (surface, forme...).
Les forces de pression dépendent de la forme du corps et la disposition que celui-ci occupe par rapport à la direction de la vitesse relative du flux d'air.
Les forces de frottement, dues à la viscosité de l'air, ont un effet directement en rapport avec l'étendue de la surface du corps et aussi avec l'état de cette surface.
En plaçant une plaque plane perpendiculairement au flux d'air, nous constatons que l'air exerce une forte pression à l'avant, tandis qu'à l’arrière se forme un dépression.

Ecoul Plaque

En installant un appareil (dynamomètre) relié à la plaque, on peut mesurer cette force exercée par l'air et quels sont les facteurs qui vont la faire varier.

Facteurs influençant la résistance de l'air

Aire
Si on double l'aire de la plaque plane, la force mesurée par le dynamomètre double également : La résistance de l'air est proportionnelle à l'aire.
Vitesse
En augmentant la vitesse de l'écoulement, la force exercée par l'air augmente elle aussi : La résistance de l'air est proportionnelle au carré de la vitesse
Masse volumique
La densité de l'air diminue avec l'altitude, la résistance de l'air va diminuer également. On en déduit donc : La résistance de l'air est proportionnelle à la masse volumique de l'air.
Forme du corps
En installant un appareil (dynamomètre) relié à la plaque, on peut mesurer cette force exercée par l'air et quels sont les facteurs qui vont la faire.


Ecoul Disque Plat Écoulement de l'air sur un disque plat de faible épaisseur disposé parallèlement aux filets d'air est le siège d'une résistance minimale due simplement au frottement de l'air sur les deux parois de la plaque.
Résistance quasi nulle
Ecoul Obs Planche En mettant un disque plat perpendiculaire au flux d'air d'une soufflerie, nous constatons que l'écoulement de l'air peine à contourner l'obstacle et qu'il se forme une surpression à l'avant et une dépression à l'arrière avec effet tourbillonnaire.
Résistance 100 %
Ecoul Obs Demi-Rond En ajoutant une demi-sphère à l'avant du disque nous constatons que l'air contourne mieux l'objet, la surpression diminue mais il subsiste toujours une dépression et une zone tourbillonnaire à l'arrière.
Résistance 75 %
Ecoul Obs Rond Si on complète cette demi-sphère pour former une sphère complète, l'écoulement est amélioré, le zone tourbillonnaire arrière est réduite, mais pas complètement résorbée.
Résistance 50 %
Ecoul Obs Profile En étirant la partie arrière de la sphère pour obtenir sensiblement la forme d'un œuf, on constate que les filets d'air se rejoignent à l'arrière sans créer de tourbillons. On obtient ainsi un corps fuselé.
Résistance 15 %
Ecoul Obs Rond Un corps fuselé "pointu" à l'arrière (bord de fuite), crée une circulation.
Théorie de la circulation ou de Kutta & Jukowski
Résistance 5 %

Expression de la résistance de l'air

La résistance de l'air est proportionnelle à la surface présentée perpendiculairement à l'écoulement, au carré de la vitesse de l'écoulement, à la masse volumique de l'air et à la forme du corps.
Nous pouvons donc écrire que : `R = KρV^2S`
avec :
- `R` résistance de l'air exprimée en Newton
- `K` coefficient qui tient compte de la forme du corps et de son état de surface
- `ρ` masse volumique de l'air exprimée en kg.m-3
- `V ` vitesse exprimée en ms-1
- `S` exprimée en m2 surface présentée perpendiculairement à l'écoulement

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Nombre de Reynolds

Osborne Reynolds ingénieur anglais spécialiste de l'hydrodynamique a mis en évidence un nombre sans dimension caractéristique de la nature de l'écoulement d'un fluide (1883) : le nombre de Reynolds. Ce nombre qui porte son nom est le rapport entre les forces d'inertie des molécules du fluide, et les forces de viscosité de ce fluide. La valeur de ` ℜe` dépend des dimensions du corps (longueur ou corde), de la vitesse de déplacement ( `V ` ) et de la viscosité cinématique du fluide ( `ν` ). L'intérêt initial de ce nombre est de pouvoir comparer l'écoulement d'un fluide à l’intérieur d’une canalisation ou autour d’un obstacle solide. `ℜe` est généralement très faible dans les milieux denses et visqueux, et plus élevé dans les milieux fluides et peu denses. En aéronautique, `ℜe` est généralement exprimé en millions (106).
`ℜe` ` = \frac{V l}{v} = \frac{ρV l}{μ}`
- `V` = vitesse du point considéré en m/s
- `l` = abscisse du point considéré en m
- `ν` = viscosité cinématique.
avec :
- `νμ /ρ` en m2/s .
- `ρ` masse volumique du fluide.
- `μ` viscosité dynamique du fluide.
Pour une aile le nombre de Reynolds est fonction de trois paramètres :
- la longueur de la corde de l'aile `l`
- la vitesse relative `V` de l'avion par rapport à l'air
- la viscosité cinématique du fluide `μ`
Note : La corde variant le long de l'aile, le nombre de Reynolds ne sera pas constant sur toute l'aile.

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Couche limite

Lorsqu’un fluide se déplace autour d’un obstacle, les champs de vitesse et de pression sont perturbés par ce dernier. La couche limite est la zone de fluide contiguë à la paroi, dans laquelle se produit l’accommodation entre la vitesse nulle en paroi et la pleine vitesse locale du fluide libre. De nombreuses propriétés de l’écoulement (frottement, transferts thermiques et présence éventuelle de décollements) dépendent de cette couche limite. La notion de la couche limite est due à L.Prandlt, 1904. Il permit de livrer une interprétation à bon nombre de phénomènes que la théorie des fluides parfaits ne suffisait à expliquer. C'est la couche limite qui conditionne directement la résistance de frottement du corps. En revanche, en dehors de la couche limite on pourra considérer que le fluide a une viscosité nulle.
Il existe donc prés de la paroi une région dans laquelle la vitesse passe de 0 sur la paroi à la vitesse de l’écoulement de fluide parfait à une distance de l’ordre de `ℜe^- \frac{1}{2}` de la paroi.
(Thése de Sébastien Bourgois- 2006)

L'épaisseur d'une couche limite varie suivant l'état de la surface (plus la surface est lisse, plus la couche est mince) ; mais aussi suivant la vitesse du fluide. L’accélération de l’écoulement hors de la couche limite contribue à amincir la couche limite, en revanche, s’il y a décélération de l’écoulement hors de la couche limite le fluide est emporté de la paroi vers l'écoulement extérieur et se rajoute à l'épaississement de la couche limite provoquée par la diffusion de la quantité de mouvement due à la viscosité.
On distingue deux types de couche limite :
La couche limite laminaire est caractérisée par le fait que tous les vecteurs vitesse sont parallèles à un même plan, l'écoulement se présente alors sous la forme de lames d'air glissant les unes sur les autres. Ces lames restent rectilignes sur une certaine longueur, puis s’estompent. On observe une telle couche limite vers le bord d'attaque d'un profil.
On appelle conventionnellement l'épaisseur ` δ` de la couche limite la distance à la paroi à partir de laquelle la vitesse `V` est telle que : `V=0,99 V_o` ( Vo étant la vitesse qui existerait si l'air était sans viscosité).

Ecoul Laminaire

En fait assez rapidement les lames disparaissent et l'écoulement présente un caractère désordonné, due en partie aux aspérités qui existent toujours sur la paroi. La couche limite devient turbulente et les vecteurs vitesse ne sont plus parallèles ente eux.
Vue schématique de la couche limite.

Ecoul Laminaire/Transition

Sur un profil, il existe donc une zone où la couche limite est laminaire et une zone où la couche limite est turbulente.
Sur un avion de transport l’épaisseur `δ` de la couche limite qui se développe à la surface de son aile peut varier de quelques millimètres au bord d’attaque à quelques centimètres au bord de fuite.

Ecoul Transition

La zone où la couche limite laminaire devient turbulente est la zone de transition. La transition vers la turbulence se déroule généralement en plusieurs étapes :
– des ondes d’instabilités de faible amplitude apparaissent d’abord dans l’écoulement laminaire,
– ces ondes se déforment et les lignes de vorticité associées à ces perturbations adoptent une forme de fer à cheval et sont progressivement étirées par l’écoulement,
– cette structure donne naissance à des instabilités secondaires. Des régions turbulentes ou « spots turbulents » apparaissent en aval,
– la croissance puis la fusion de ces structures conduit à l’écoulement turbulent dit pleinement développé.
Ci-dessous de gauche à droite l'écoulement laminaire devient turbulent

Ecoul photo  couche tourbillon

La couche limite turbulente, qui s’épaissit plus rapidement que la couche limite laminaire, résiste par ailleurs beaucoup mieux aux gradients de pression adverses.
La zone de transition ou plutôt le point de transition n'est pas fixe, et dépend :
- du nombre de Reynolds : lorsque le nombre de Reynolds dépasse une certaine valeur critique, on observe une transition de la couche limite laminaire vers la turbulence. On peut dire que si le nombre de Reynolds de l'écoulement croît, le point de transition de la couche limite se déplace donc vers l’amont
- de la courbure : l’effet de la courbure de paroi sur le point de transition est faible, et le nombre de Reynolds de transition est pratiquement inchangé par rapport au cas de la paroi plane. Par contre, dans le cas d’une paroi concave des effets significatifs sont observés.
- de l'état de la surface (rugosité) : l’effet des rugosités de paroi est d’avancer la transition, c’est-à-dire de la provoquer à un nombre de Reynolds plus faible. Toutefois, il existe une taille critique de rugosité en dessous de laquelle la position de la transition reste inchangée.
- du nombre de Mach

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Décollement

La nature de la couche n'a pas d'importance, par contre l'important est la "fragilité" de cette couche limite.
En considérant les sections 1, 2, 3 d'un profil on constate que la couche limite en 3 est plus fragile qu'en 2, elle-même plus fragile qu'en 1.

Ecoul couche limite

En fait, le phénomène principal dans une couche limite est le frottement, et ce frottement tout à fait irréversible, consomme de l'énergie sous forme de chaleur. Cette énergie consommée est l'énergie de pression de la couche limite. Soit : ` P3 < P2 < P1`
Il peut arriver que ` P3` soit supérieur à ` Po` pression aval, c'est le cas des fortes incidences.

Ecoul limite tourbillon

À ce moment il y a inversion locale de l'écoulement et la couche limite décolle.
Cette explication fort simpliste explique en gros les phénomènes complexes qui se produisent lors d'un décollement. Au-delà du point de décollement D la vitesse est inversée.
Cette structure d'écoulement n'est pas stable et entraine la formation de tourbillons.

Ecoul photo  couche tourbillon

Ci-dessous photographie informatique (Snapshot) de la vitesse longitudinale dans le cas de l'écoulement décollé autour du profil ` NACA  012`   à   `ℜe = 5000` et ` α = 16°`

Photo informatique

Il est important de noter l’existence d’un type particulier de décollement appelé bulbe de décollement laminaire qui fait chuter notablement la finesse aérodynamique d’un profil. Ce phénomène apparaît lorsqu’une couche limite laminaire décolle en présence d’un léger gradient de pression défavorable en raison de sa nature laminaire qui la rend relativement sensible au décollement. La transition à la turbulence se fait alors dans la zone décollée et elle recolle au profil en régime turbulent lorsqu’elle gagne l’énergie cinétique nécessaire pour compenser l’effet du gradient de pression. Il se forme alors la zone de décollement local généralement située dans la région du bord d’attaque du profil appelée bulbe laminaire, perturbant l’aérodynamique du profil.
Contrôle d’écoulements par Julien Favier

Ecoul bulbe

Comment agir pour contrôler le décollement

Le décollement de la couche limite, générateur de perte de portance et d’augmentation de traînée, nuit considérablement aux performances des profils d’ailes, il faut donc chercher à le réduire. Pour contrôler le décollement, il est apparu naturel d’intervenir au niveau de l’écoulement de proche paroi, car c’est en agissant au niveau de la couche limite qu’il est possible d’influer sur les caractéristiques aérodynamiques globales d’un profil. Plusieurs méthodes ont été explorées comme le soufflage ou l'aspiration.
Tous les avions de transport modernes sont équipés de becs à fentes au bord d’attaque et de volets à fentes au bord de fuite des ailes. Ces hypersustentateurs sont entièrement déployés à l’atterrissage. Pour des raisons de sécurité, l’atterrissage doit s’effectuer à la vitesse la plus faible possible. Pour maintenir une portance suffisante à faible vitesse il est nécessaire d’augmenter considérablement l’angle d’incidence. Les becs à fente de bord d’attaque ré-injectent de l’air à vitesse élevée sur l’extrados et retardent ainsi le décollement de la couche limite. Les volets de bord de fuite permettent de réorienter le flux d’air quittant l’aile vers le bas et augmentent la portance.
Ci-dessous Schéma d’un profil d’aile avec bec de bord d’attaque et volets de bord de fuite.

Ecoul bec et volets

Pour le contrôle du décollement, voir également Ailes en flèche et aile delta.

Avec le développement de nouvelles technologies et l’amélioration des connaissances relatives à la dynamique interne de la couche limite turbulente, plusieurs techniques ont été explorées telles que la modification de géométrie pour obtenir un gradient de pression favorable plus long, l’utilisation de l’aspiration pour stabiliser la couche limite, ou encore le refroidissement de la surface. Le soufflage a aussi été une technique explorée pour éviter la séparation de la couche limite.

Ecoul Aspiration soufflage

Dessin ci-dessous le soufflage ou l'aspiration de la couche limite à travers les fentes (ou perforations) 1 du revêtement intensifie l'écoulement dans la couche limite et permet de maintenir l'écoulement laminaire sur une grande partie de la surface de l'aile. Le contrôle de la couche limite ou le contrôle de l'écoulement laminaire permet de réduire considérablement la résistance au frottement, et d'améliorer la qualité aérodynamique de l'écoulement aux grands angles d'attaque. Le choix approprié de la position des fentes sur la surface et de la quantité d'air soufflé (ou aspiré) peut permettre une telle interaction des courants 2 avec le flux principal 3 , qui conduira à la formation d'une super-circulation (circulation supplémentaire du flux), dont l'essence est une accélération (ou un freinage) supplémentaire du flux et, par conséquent, une réduction (ou une augmentation) de la pression dans certaines parties de la surface d'appui pour obtenir une augmentation de portance.

Ecoul  soufflage Aspiration

D'autres techniques de contrôle possibles, passives ou actives, sont actuellement à l'étude.
Il est important de noter qu’actuellement dans la plupart des cas, si les gains de performances aérodynamiques ont été bien démontrés en laboratoire, il y a jusqu’ici peu d’applications opérationnelles dans des conditions réelles.
Les différentes méthodes de contrôle sont dites actives si elles comportent une injection d’énergie dans le système, ou passives si elles constituent une simple modification physique du système.
Pour plus de détails voir la thèse : Contrôle d’écoulements par Julien Favier
Attention : il ne faut pas confondre décollement et écoulement turbulent. Un écoulement turbulent augmente un peu la traînée mais retarde le décollement car il recèle plus d'énergie qu'un écoulement laminaire.

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